La variabilité de fréquence cardiaque de repos
Dans mon dernier billet, il était question de la quantification de la charge d’entraînement. Bien qu’utile, la méthode que je présentais demeure très théorique et ne tient pas compte de la réponse réelle de l’organisme. Pour ce faire et aller encore plus loin, il est possible d’avoir recours à la variabilité de fréquence cardiaque (VFC) de repos.
Deux types d’analyses sont possibles, une analyse temporelle ainsi qu’une analyse fréquentielle. L’approche temporelle s’intéresse à la variabilité dans le temps entre deux battements. Cette méthode est valide pour avoir une vision globale de l’état de fatigue, mais ne permet pas d’en distinguer les différents types. L’analyse fréquentielle permet quant à elle de distinguer différent types de fatigue. Sans entrer dans les détails techniques de l’analyse du signal, les valeurs intéressantes qui en découlent sont le HF (High frequency) et LF (Low frequency). Ces valeurs permettent de déterminer l’influence des composantes sympathique et parasympathique du système nerveux autonome sur le rythme cardiaque. Le HF correspond à l’influence du parasympathique alors que le LF représente principalement l’activité sympathique. Une simple mesure de 5 minutes au réveil en position couchée permet de distinguer 3 types de fatigues. Par exemple, le surentraînement réel (à ne pas confondre avec le surmenage ou overreaching) est caractérisé par une hypertonie parasympathique qui se manifeste par une diminution de la FC de repos et une augmentation importante de la valeur de HF. Comme quoi, une diminution de FC n’est donc pas toujours un signe de grande forme. Une mesure plus complexe, incluant une phase debout, permet d’aller encore plus loin dans l’analyse. C’est d’ailleurs ce que propose l’application in-Corpus avec ces huit ‘profils énergétiques’ qui sont déterminés suite à une mesure de 10 minutes (5 minutes couchées suivi de 5 minutes debout).
Je m’intéresse à la VFC de repos depuis ma maîtrise, suite à un cours de Grégoire Millet à ce sujet. À ce moment, les applications disponibles n’étaient pas à la hauteur de mes attentes et j’analysais des enregistrements de fréquence cardiaque directement avec le logiciel Kubios. Un processus long, mais très formateur. Il existe maintenant quelques bonnes applications qui permettent une analyse plus efficace. En raison du coût relativement élevé de in-Corpus, j’utilise plutôt l’application Elite HRV en ce moment. Dans tous les cas, une mesure matinale de cinq minutes suffit pour éviter le surentraînement et optimiser la planification de l’entraînement. Ceci-dit, même s’il est assez simple de déterminer la présence de fatigue, les ajustements à apporter à l’entraînement ne sont pas aussi évidents. En partant du principe (débattable) qu’un état de surmenage fonctionnel juste avant une phase d’affûtage permet d’optimiser la performance, la détection précise de celui-ci devient importante. Malheureusement, les études sur le sujet ne pointent pas toutes dans la même direction par rapport aux meilleurs indicateurs pour le détecter. Toutefois, en plus des valeurs de hautes et basses fréquences mentionnées précédemment, le suivi du RMSSD semble intéressant. Cependant, il serait important de ne pas s’en tenir à une mesure unique et considérer la moyenne de plusieurs jours. Un suivi à long terme est aussi possible, une étude s’est d’ailleurs intéressée aux valeurs de VFC de Martin Fourcade sur 11 saisons. Celle-ci montre que certains marqueurs d’activité parasympathique étaient corrélés positivement avec ses performances. Ces dernières sont d’ailleurs meilleures lorsque son entraînement est très polarisé et comprend un important volume à basse intensité. Un thème que j’aborderai dans un prochain billet.
Au final, les données découlant de l’analyse de la VFC peuvent paraîtres plus intéressantes qu’utiles. Concrètement, je fais une analyse plus approfondie des valeurs de VFC seulement quand le morning readiness donné par l’application est dans le jaune ou dans le rouge. C’est dans ces situations que je trouve pertinent d’aller voir comment le LF et le HF se comparent aux valeurs habituelles de l’athlète. Par exemple, en cas de sur-activation parasympathique, un repos complet ou une activité à faible intensité n’est pas nécessairement la meilleure solution et il pourrait être bénéfique de plutôt faire une séance courte comprenant des sprints. Bref, en combinant les données de VFC avec la charge d’entraînement et les sensations rapportés par l’athlète, il est possible de se faire une bonne idée de sa réponse à l’entraînement et des ajustements à apporter. Au fait, le suivi de la VFC est inclus dans mon offre de coaching premium.